mardi 27 mai 2014

Les tsingy, des forêts de pierre à Madagascar



L'Antsingy du Bemaraha traversé par le fleuve Manombolo - imagerie Google earth
Il existe à Madagascar des formes particulièrement spectaculaires de pinacles en forme de lames aiguës pouvant atteindre de 10 à 60 mètres de hauteur : ce sont les tsingy, terme passé dans le vocabulaire international de la géomorphologie. Ils se développent dans des calcaires massifs épais de plusieurs mètres. Il semble s'agir de crypto-formes. Elles peuvent s'organiser en ensembles de plusieurs kilomètres carrés comme c'est le cas dans l'Antsingy du Bemaraha, celui de Namoroka ou celui de l'Ankarana.  Les trois sont classés en aires protégées. 


 
L'Antsingy de Namoroka, le plus isolé et le moins bien connu

Le causse de Bemaraha (traduction : "très rugueux") qui s'étend sur environ 250 km du Nord au Sud, présente  un immense secteur de tsingy et de forêt. On trouve les tsingy  sur la bordure occidentale du causse ce qui implique de faibles dénivelées (60 mètres maximum). Les secteurs les plus spectaculaires se situent dans la partie méridionale : des arbres gigantesques partis du fond des couloirs ou accrochés au flanc des tsingy s'épanouissent au-dessus des rochers. Ceux-ci sont eux-mêmes colonisés par la forêt dense sèche. Les tsingy s'organisent en massifs linéaires de largeur variable, séparés par des kitsy  (couloirs étroits) et des tatatra  (couloirs larges) de largeur également variable (de quelques décimètres à quelques dizaines de mètres) de différents types : à fond rocheux ou obstrués par des éboulis (rakorako) ou de gros blocs, peu ou non végétalisés ; à fond humifère ou argileux le plus souvent couvert de végétation (baihibohonala). Le fond des kitsy est souvent encombré de gros blocs rocheux et ils sont souvent obturés à leurs deux extrémités par des murailles calcaires, comme dans le cas du réseau Ming.
Tsingy dans le Bemaraha
L'Antsingy de Namoroka - imagerie Google earth
Cependant les pans de roche sont percés de gigantesques porches étagés correspondant à d'anciennes galeries. Celles-ci ont été utilisées par l'homme à diverses époques. J.C. Dobrilla a confirmé la présence de peintures murales, notamment de mains en négatif. Il a découvert de nouveaux sites de sépultures beaucoup plus importants et mieux conservés que ceux des gorges du Manombolo. Dans la plupart des grottes dotées de points d'eau, on note un amoncellement de tessons de poteries, voire de porcelaine chinoise, et parfois des traces d'habitat. Il y a lieu de penser que s'y est retranchée une population vazimba autochtone avant même l'arrivée des Sakalava. La conquête française qui y fût  tardive (1906) poussa de nombreuses familles réfractaires à l'impôt à se réfugier dans quelques unes des innombrables grottes. Aujourd'hui encore, l'Antsingy est le refuge de dahalo voleurs de zébus. 
 
Les différentes formes


 




















Les flancs des tsingy sont striés de cannelures et cariés d'alvéoles. Quelques Pachypodium  et Lomatophyllum s'y accrochent parfois, ainsi que des Ficus. La pénombre, la fraîcheur et l'humidité qui prévalent au fond de ces couloirs explique la présence occasionnelle d'une forêt subhumide comportant notamment plusieurs espèces de Pandanus et des fougères. Les lianes sont nombreuses, de même que les arbres établis sur les flancs rocheux capables de lancer leurs racines plusieurs mètres en contrebas vers le fond des couloirs. 

L'Antsingy du Bemaraha vu sur Google earth


samedi 24 mai 2014

Anjohibe (Nord-ouest de Madagascar), un site habité depuis 4 300 ans



L’existence des grottes d’Anjohibe (et d’Anjohikely), au Nord-Ouest de Madagascar, est mentionnée par R. Decary dès 1934. Ce site est d’ailleurs bien connu des touristes qui y viennent depuis la ville de Mahajanga. Les grandes salles sont très spectaculaires et on compte cinq kilomètres de galeries. Depuis 1934 plusieurs équipes scientifiques y ont par ailleurs travaillé, notamment celle de la MAPPM (Mission archéologique et paléontologique dans le Province de Mahajanga) conduite par Dominique Gommery à partir de 2003. Sa finalité était de trouver des subfossiles, squelettes d’animaux ayant aujourd’hui disparu :  hippopotames nains, lémuriens géants comme Megaladapis, Archaeolemur, Pachylemur, voire Prolemur. En 2010, sont découverts des ossements d’hippopotames nains portant nettement de nombreuses traces de découpe. Ces restes ont été datés de 2500 avant J-C. Cela permet de confirmer que des groupes humains formés de chasseurs/cueilleurs sont en place à Madagascar depuis bien plus longtemps qu'on ne le supposait (Voir : Le peuplement de Madagascar à la lumière de l'anthropobiologie). Les Vazimba sont peut-être leurs descendants. Longtemps on a pensé que les plus anciennes traces de présence humaine à Madagascar dataient seulement de 1 200 à 1 400 ans. Ces découvertes bouleversent donc nos connaissances.

Sur Google earth - image de 2007 : localisation des grottes au-dessus de la baie de la Mahajamba
A lire :

  •  Decary, R.,1934.- Les grottes d’Anjohibé. La Revue de Madagascar, 8,81–85.
  • Gommery, Dominique, Ramanivosoa, Beby, 2011.-  Les lémuriens subfossiles dans le Nord-Ouest de Madagascar, du terrain à la diffusion des connaissances ou 15 ans de recherches franco-malgaches, Revue de primatologie [En ligne] mis en ligne le 17 mai 2011, URL http://primatologie.revues.org/670
  • Gommery, Dominique, Ramanivosoa, Beby, Faure, M., Guérin, C., Kerloc’h, P., Sénégas, F., Randrianantenaina, H., 2011.- Les plus anciennes traces d’activités anthropiques de Madagascar sur des ossements d’hippopotames subfossiles d’Anjohibe. Comptes-rendus Palevol, 10 : 271-278. URL  http://www.reseaurecherche-coi.com/documents/actions/120113_PALEVO578.pdf
Google earth - image de 2007 : Anjohibe

Google earth - image de 2007 : Anjohibe, son karst à dolines




mardi 6 mai 2014

Le consulat de France de Mahajanga après le passage du cyclone Kamisy en 1984

Après avoir touché Diégo et Mayotte, le cyclone Kamisy toucha Majunga dans la nuit du 11 au 12 avril 1984. Les destructions furent terribles et on compta environ 40 000 personnes sans abri. Le consulat de France perdit une partie de son toit.


lundi 5 mai 2014

Soldats du Sud malgache morts pour la France lors de la Grande Guerre



Aux quatre coins de la France et dans quelques autres pays d’Europe, on peut découvrir dans des cimetières militaires et dans ceux d’hôpitaux, les tombes sobres mais bien entretenues de soldats malgaches morts au service de la France durant la guerre de 1914-18. Ces hommes ont quitté leurs familles et leur village pour ne jamais les revoir, après avoir vécu une difficile adaptation à un climat rigoureux dans un contexte d’effroyable violence.  Dans la plupart des cas, ces familles n’ont jamais su où et comment ils étaient morts : les données de la fiche militaire de ces soldats étaient souvent insuffisantes pour localiser exactement les parents, sauf au prix de longues recherches à l’image de ce qui s’est fait en Nouvelle-Calédonie et qu’il serait nécessaire d’appliquer à Madagascar. Seules quelques-une des dépouilles  mortelles ont été rapatriées, la plupart du temps dans des carrés militaires, alors qu’il aurait été indispensable de faire des funérailles  selon les traditions locales. Pourtant ces hommes sont morts avec bravoure, ils ont été unanimement appréciés par leurs compagnons et par tous ceux qui ont eu la chance de faire leur connaissance en France (nombreux récits). La victoire de 1918 leur doit beaucoup.  
Selon le site  Grande Guerre  et d’après la base de données de Mémoires des hommes, au moins 3744 soldats  malgaches ou personnel militaire (infirmiers) seraient morts lors de la Grande Guerre. On estime cependant qu’il y en eut bien davantage. Ils avaient été entre 30 000 et 40 000 à quitter Madagascar pour rejoindre la France et d’autres points du Globe où l’armée française était engagée, notamment en Grèce, en Serbie ou encore en Egypte. De nombreux soldats sont morts sur les navires qui les transportaient. La plus grande catastrophe fut le naufrage du Djemnah torpillé le 14 juillet 1918 par les Allemands au large de la Libye : 200 tirailleurs malgaches y périrent.

De tous ces morts, la majorité appartenait à l’infanterie (2499) et à l’artillerie (445). Ils faisaient partie de nombreux régiments d’outre-mer (infanterie coloniale) ou de métropole. Les plus célèbres furent le 12e et le 73e bataillon de tirailleurs malgaches. La plupart de ces soldats (environ 75%) sont morts de maladie (pneumonies, tuberculose, grippe, méningite, etc.) ou de blessures dans des hôpitaux de l’arrière ou directement sur le front. De nombreux autres ont été tués lors des combats dans lesquels ils ont été engagés. 
Pour le moment, on ne dispose pas de statistiques sur la part du Sud dans l’effort de guerre de Madagascar dans la Grande Guerre. Selon Gontard (1966), entre le 16 octobre et le 30 décembre 1916, il n'y eut que 0,1% d'engagés venant de la région de Tuléar. Le site « Tiraera » a l’avantage de nous proposer 512 fiches localisées de soldats morts. 10% de ces soldats morts sont originaires de la partie méridionale de Madagascar. Rien ne certifie cependant que cette proportion soit proche de la réalité.

A consulter : 
La nécropole de Luynes à Aix - Google earth

Le cimetière du Trabuquet à Aix - Google earth